Un président pour quoi faire ?
La rengaine est connue chez certains candidats et leurs soutiens : "DSK est très bien, il est très compétent mais il fera un meilleur Premier ministre".
Même si ça nous énerve, nous autres strausskistes, l'argument, qui se veut de poids, a de quoi surprendre et surtout n'augure rien de bon pour le type de présidence que les candidats en question souhaitent mener.
Au moins Dominique sait ce qu'il veut faire une fois élu par les Français, il a une vision du monde et surtout une vision de la fonction présidentielle. Chose dont semblent manquer certains camarades.
Dans son discours de l'Oratoire à La Rochelle, il l'a très clairement dit !
"Au bout du compte, la question est : que doit faire le Président de la République ? C’est un peu à cela que j’ai voulu commencer à répondre avec vous ce soir, ce qui est une autre manière de répondre à une autre question : pourquoi est-ce que je suis candidat ?
Je suis candidat, parce que je crois qu’il faut donner un nouveau souffle à notre pays. Il faut mettre en œuvre le changement, et c’est le Président de la République qui doit conduire ce changement.
Le temps est passé du président paternaliste, irresponsable et, sur beaucoup de grands sujets finalement, impuissant. Le temps est passé du président issu d’un clan et gouvernant par un clan - et souvent pour un clan. Le temps est passé, du président qui donne le cap et s’en contente. Il faut maintenant qu’il tienne la barre. Il faut un président qui s’investit, un président qui imagine, un président qui innove, un président qui agit.
Depuis cinq ans, la présidence de la République de notre pays est une défausse permanente. Il faut un président convaincu. Pour cela, il faut une candidature de conviction.
Le parti Socialiste est-il prêt pour cela ? Il est vrai que, depuis quatre ans, nous avons perdu beaucoup de temps. Mais maintenant, nous avons notre projet. Il y a beaucoup de bonnes choses dedans. Il y a beaucoup de propositions utiles, sur un ensemble de sujets : le logement, le service public de la petite enfance, la sécurité, que sais-je encore ! Et d’ailleurs, il ne demande qu’à être enrichi, et j’ai entendu Laurent Fabius l’autre jour faire des propositions, qui me semble utiles.
Mais ce projet ne suffit pas à faire une conviction pour la France. Ma conviction pour la France, c’est que nous devons demain, assurer son indépendance énergétique : notre survie politique en tant que nation est à ce prix. Et c’est là le rôle du Président de la République. Ma conviction pour la France, c’est que nous devons redéfinir le compromis social qui permet de partager la richesse créée avec le moins d’inégalité possible. Redéfinir ce partage, c’est le rôle du Président de la République. Ma conviction, c’est que nous devons faire évoluer notre modèle de société pour être demain encore parmi les grandes puissances industrielles de cette planète. C’est le rôle du Président de la République. Ma conviction c’est que nous devons relancer la construction européenne. C’est le rôle du Président de la République. Ma conviction, c’est que nous devons nous ouvrir au Sud et, par là même, jeter les bases d’un nouvel ordre international. C’est le rôle du Président de la République.
C’est au nom de ces convictions-là que nous, nous la gauche, pouvons proposer à la France, et aussi à l’Europe, une voie nouvelle dans la mondialisation. Et je suis candidat pour être le Président qui mène le pays sur cette voie nouvelle.
En aurons-nous la force ? Oui. Oui, je crois que nous l’aurons, mais à quelques conditions.
A condition de savoir redonner à la politique sa noblesse. A condition d’être capable de refuser le renoncement que j’évoquais tout à l’heure au sujet de Nicolas Sarkozy. A condition d’être capable de repousser la tentation du populisme qui se nourrit de nos échecs. Finalement, à condition d’être capable de redonner à la démocratie une vie. Or le cloaque dans lequel se trouve aujourd’hui la démocratie française est quelque chose qu’aucun d’entre nous ne peut continuer à tolérer. Bien sûr, j’entends déjà les commentaires : « c’est la Vème République, elle a été construite pour cela ! Pour faire en sorte que l’exécutif ait tout le pouvoir et que le contrôle parlementaire soit finalement réduit à peu de chose ».
Et bien, si c’était l’objectif des fondateurs de la Vème République, ils ont réussi. Et il faut en sortir. Je veux un président convaincu, un président qui gouverne, mais je veux en face un Parlement - à commencer par une Assemblée Nationale - qui soit là pour en organiser le contrôle. Restaurer le contrôle parlementaire repose sur tout un ensemble de mesures. Le parti socialiste a prévu que les députés soit des députés à plein temps, c’est bien ! Il faut aussi revoir le nombre de commissions, il faut limiter l’emploi du 49-3. J’ai une longue liste de mesures que je ne vais pas détailler ce soir.
Ce qui compte, c’est de faire en sorte que demain nous nous retrouvions dans une situation où nous ayons, plus que par le passé, un président qui gouverne et, plus que par le passé, un parlement qui contrôle.
Et encore, lorsque nous aurons fait cela, nous n’aurons fait que la moitié du chemin. Car la démocratie demain, dans notre pays, ne peut se limiter à la démocratie d’Etat. C’est aussi revenir sur la décentralisation et sur les territoires. Napoléon nous a légué en héritage, lui-même reçu de Louis XIV, une France centralisée et un Etat puissant. En 1981, les socialistes ont fait naître une force nouvelle : celle du pouvoir local, par la décentralisation. C’était en 1981, il y a 25 ans, l’enfant arrive aujourd’hui à l’âge adulte.
L’âge adulte de la décentralisation, c’est celui dans lequel les relations entre l’Etat et les collectivités territoriales, notamment les régions et les départements, doivent être des relations d’égal à égal. Le mépris que l’on ressent partout, des responsables politiques vers les élus locaux, des administrations centrales vers les administrations locales, n’est plus tolérable.
Le nouvel âge de la décentralisation, la République territoriale qu’il faut construire aujourd’hui, c’est le deuxième pilier d’un renouveau de notre démocratie. Là où les citoyens sentent que la démocratie vit. Ce n’est pas un hasard, si les seuls responsables politiques que les Français mettent en haut de leurs sondages, ce sont les maires ! Mais lorsque l’on interroge nos concitoyens sur les autres responsables politiques, ils les font figurer tout en bas de la liste.
C’est dans ce rééquilibrage, dans cette ère nouvelle de la décentralisation, qu’à côté du renforcement des pouvoirs du Parlement, je vois l’équilibre à venir des pouvoirs dans notre pays.
Telle est ma conception de la présidence de la République. Il peut y en avoir d’autres. Mais je n’ai pas entendu aujourd’hui, dans le parti, beaucoup de candidats exprimer sur ce sujet des positions arrêtées. Elles me semblaient souvent soit trop classiques, soit trop vagues. Il faut donc qu’il y ait un débat, car la conception de la présidence est un des enjeux des mois qui viennent.
Pour ma part, je ne suis pas candidat à une présidence gaullienne, ça n’est pas mon essence. Je ne suis pas candidat à une présidence mitterrandienne : aujourd’hui, cela n’aurait plus de sens. Je ne suis pas plus candidat à une présidence chiraquienne - d’ailleurs, est-ce une présidence ? Je suis un candidat porté par des convictions, pour donner un nouveau souffle à la France."